23
DECEMBRE 1944 : Journée calme passée à ORBEY. De plus en plus nous
voyons défiler de nombreux prisonniers que ramènent vers larrière notre
infanterie. On les voyait épuisés glissant sur la neige gelée, loeil hagard nous
regardant comme des bêtes curieuses. Quel monde étrange que la guerre ! Au-dessus
du village, le ciel était gris à linfini. Par moments il neige fort et la
température continue largement de descendre au-dessous de zéro. Dans la journée le
froid augmente, le vent souffle de plus en plus soulevant des tourbillons de neige. Nos
blindés dissimulés un peu de partout dans les rues, semblent inertes, sans vie. Nous
logeons dans les maisons les plus proches vides de leurs habitants.
24 DECEMBRE 1944 :
Veille de NOËL. Que va nous réserver cette journée? Allons nous pouvoir assister à la
messe de minuit qui sera célébrée pour la circonstance dans une cave, car
léglise nest plus quune ruine. Nous lavons tous espéré, mais
hélas cela ne sera pas le cas
A 9h00, notre escadron reçoit lordre de
participer à la défense de FAING et de TANNACH car lennemi vient de
contre-attaquer à louest de ces localités. Nos chefs de groupe reçoivent leurs
missions. Nous partons. Dans lécho de la vallée roulent longuement les coups de
tonnerre dun engagement situé non loin de là. Devant nous on ne voit pas au-delà
dune dizaine de mètres tellement les gros flocons de neige qui tombent grossissent
au fur et à mesure quils arrivent au sol. Des congères se forment sur les bords de
la route. Linfanterie qui nous suit a de la peine à se tenir debout. On sent la
présence toute proche de lennemi. Déjà on entend des coups de feu tirés
dun bois dans le voisinage. Nos adversaires sont bien postés derrière les talus
des fossés ou bien derrière les amas de neige. A certains endroits, ils essaient de
gagner du terrain, aussi nos unités doivent progresser par bonds et marquer plusieurs
arrêts dans leur marche en avant pour tirer. Les chenilles de nos chars narrivent
même pas à entamer les bords de la route tant le sol était gelé, dur comme de
lacier.
Le 3e escadron est en difficulté dans le secteur de
TANNACH. Il est sans cesse attaqué par une infanterie ennemie mordante, appuyée par une
forte artillerie. Nous ne attendions pas à cette forte attaque, surtout en cette veille
de Noël. Pour notre escadron, il est primordial daller renforcer le 3e
escadron et de contenir la poussée ennemie. De partout les Allemands font le forcing et
mettent en oeuvre quelques blindés et unités motorisées, mais il ne peuventt se mouvoir
comme ils le voudraient, car il ne peuvent comme nous ségarer hors des routes.
Le terrain est très boisé. La route que nous suivons est constamment
bombardée. Des fontaines de neige sélèvent et retombent, les éclats rebondissent
sur un sol gelé. Lentement nous nous approchons dun carrefour, aussitôt nous
sommes pris par un déluge de tirs de minens. Nos chars narrivent plus à
faire avant, la moindre manoeuvre les faits déraper, Ils zigzaguent. Ceux qui arrivent
derrière nous, assistent impuissants à cet étrange carrousel. Nous bloquons la
circulation. Nous sommes immobilisés ce que profite lennemi en profite pour nous
arroser de minens. Notre lieutenant voyant ce désordre, ordonne à tous les
équipages, à lexception du conducteur, de sortir des chars et dessayer par
tous les moyens de mettre sous les chenilles tout ce qui nous tombe sous la main : terre,
débris darbustes, cailloux etc .. afin de nous sortir de ce pétrin. Dès notre
sortie nous sommes pris à partie par un tir nourri de minens. Lennemi sur
les hauteurs, règle à vue son tir meurtrier. Dans léclair dune seconde, je
vois notre tireur qui seffondre près de moi. Jessaie de le relever, hélas il
a déjà les yeux vitreux et rend son dernier soupir. Un peu plus loin, je vois notre
chargeur qui se met à courir pour sabriter, de larges plaques de sang zébrant son
dos, il a reçu quantité déclats ; il sécroule en gémissant. Je le
prends par les épaules et essaie de le ramener sous le char car il ne peut plus marcher.
Lennemi nous harcèle sans cesse, recherchant notre anéantissement total. A
larrière les autres chars essaient de reculer pour se mettre hors de portée. A ce
carrefour cest un vrai cafouillage. Ceux qui tentent de quitter la route se trouvent
embourbés dans les champs. Notre infanterie, elle aussi, cherche des abris, il y a
parmi eux des tués et des blessés.
A lintérieur du char on entend hurler notre lieutenant
dans linterphone, mais personne ne peut lui répondre. Seul le conducteur a son
poste essaie de démarrer et de se sortir de ce maudit carrefour. Les éclats de minens
viennent sécraser sur notre char avec un bruit fracassant. Je ne sais pas comment
jai pu éviter tant de métal en fusion sabattant sur nous. Voyant que notre
char ne pouvait démarrer, je mabrite du mieux au-dessous de lui, quelques
fantassins viennent eux aussi me rejoindre
Pour comble de malheur dans son
affolement notre conducteur se blesse assez sérieusement aux deux mains en voulant
rabattre précipitamment son capot avant. Le char est complètement inerte, comme mort.
Les minutes qui passent ressemblent à des heures sans fin. Soudain une brève accalmie
que nous mettons à profit pour réintégrer lintérieur de notre char. Notre
conducteur gémit à son poste, ses doigts dégoulinent de sang sur son treillis. Il
nest plus en état de conduire. Prenant linterphone je rends compte au
lieutenant qui mannonce venir prendre le commandement de notre Sherman, car notre
chef de char a lui aussi été blessé. Sitôt en tourelle, le lieutenant demande par
radio lévacuation des blessés et des tués. Ce qui fut fait en très peu de temps.
Nous tentons alors de quitter ce maudit carrefour. Lennemi donne à plein ses
dernières réserves, essayant de nous faire reculer coûte que coûte. Nos unités
sétant ressaisies nous mettons enfin hors de combat les éléments adverses qui
sétaient trop avancés. Seuls avec notre lieutenant comme chef de char, soutenus à
larrière par les autres chars du peloton, nous reprenons notre progression. Je
reçois lordre de prendre un sentier qui monte en pente très raide. Je navais
pas fait une quinzaine de mètres quau détour dun mamelon apparaît un char
destroyer de notre sous-groupement en flammes, probablement atteint par un coup de panzerfaust.
Une épaisse fumée noire sélève au-dessus de la carcasse ; des corps inertes sont
comme suspendus par dessus le blindage passé au rouge vif, dautres non loin gisent
au sol probablement abattus alors quils tentaient de fuir le brasier. Alors que
assistons impuissants à cette scène horrible, une grêle de minens vient sabattre
autour de notre char, obligeant notre lieutenant à sabriter dans la tourelle.
Impossible daller plus loin car nous ne pouvons pas contourner le char
destroyer
Cest alors que la nuit se met à tomber, si rapidement quon ne
peut bientôt plus rien distinguer. Les hommes et les machines sont exténués
davoir combattus depuis le matin. Des fusées éclairantes éclatent de temps à
autre au-dessus de ce décor spectral, ponctuées par des salve intermittentes de
mitrailleuse lourde.
Nous reculons dans un champ de neige où nous nous postons
jusquà ce que bien plus tard dans la nuit nous soyons relevés pour redescendre
vers larrière. Nous passons le reste de la nuit dans une immense ferme de la
région perchée à flanc de coteau. Il y a un continuel va-et-vient dunités
dinfanterie et déquipages de chars. Les hôtes de cette ferme se dépensent
sans compter pour nous réconforter, nous donnant des boissons chaudes, soignant nos
blessés. Javais encore en tête les événements de la journée qui bourdonnaient
sans cesse. Je me mis à sangloter. Je nétais plus le même homme. Jusquici
javais vécu bien des drames, mais pas comme celui de cet après-midi. Je revoyais
notre tireur couché à terre, mort, notre camarade SIMOND
Notre peine était
grande, et ma peine immense : SIMOND était pour moi plus quun frère. Au fin
fond du bled au MAROC,nous avions passé ensemble des moments inoubliables. Nous
partagions la même guitoune, faisions les rêves les plus fous en évoquant notre retour
un jour à la vie civile. En cette veille de Noël où il mavait proposé
dassister avec lui à la messe de minuit dont le déroulement était prévu dans une
cave, il natait plus de ce monde en fin daprès-midi
Cher SIMOND lorsque
jévoque encore aujourdhui cette tragique journée du 24 DECEMBRE 1944, je ne
peux oublier ton souvenir, un souvenir qui restera à jamais gravé dans mon coeur.
25 DECEMBRE 1944 : Journée
à peu prés calme. De temps en temps notre artillerie tire quelques obus sur les
positions ennemies installées sur les crêtes. Leffet des départs est terrifiant,
londe de choc provoquée par les une telle vague de feu, le vacarme étourdissant et
leffet de souffle doivent démoraliser complètement ceux qui reçoivent les
impacts. Trois soldats ennemis se sont rendus cet après-midi, leurs visage envahis
dune barbe sauvage, ils font pitié à voir. Nous sommes relevés par le 2e
peloton. Nous retournons à ORBEY.
29 DECEMBRE 1944 :
Voilà trois jours que nous sommes à ORBEY. Nous-nous organisons pour les prochaines
batailles. Le 2e peloton est relevé par le 3e peloton qui lui aussi
rentre à ORBEY. Le char du peloton de commandement a été atteint de plein fouet : II
reste sur le champ de bataille. Latelier régimentaire a bien essayé de le
dépanner, mais sans succès. Un porte-char devra venir le récupérer. Nous apprenons que
lennemi a arrêté ses contre-attaques, figé, littéralement gelé par la
température sibérienne. Tout est saisi par glace : Hommes, moteurs et armes.
Nous sommes renforcés par dautres sous-groupements de la
division. Pour nos futures attaques, cest à notre escadron quil incombera de
lancer la progression, non seulement en direction de lest, mais aussi au-delà des
grandes routes. Un autre escadron constituera notre aile droite. Nous commencerons par
faire mouvement à travers une forêt afin de nous rapprocher de lennemi et de nous
trouver en contact avec son arrière-garde. Nous connaissons le système de défense
adverse et la répartition approximative des troupes. Nous savons que les Allemands ont
organisé leurs lignes de défenses sur une profondeur de quinze à vingt kilomètres.
Nous avons obtenu ces renseignements grâce à linterrogatoire des prisonniers.
Chaque jour qui passait voyait se réduire les effectifs ennemis, mais il était encore
très mordant face à notre détermination à avancer. Beaucoup de nos adversaires
devaient se poser des tas de questions. Comment tenir par un froid pareil avec si peu de
forces ?
30 DECEMBRE 1944 : Lordre de
se tenir prêt à faire mouvement nous arrive dans laprès-midi. Notre
sous-groupement doit se porter dans la région de SAINT-DIE pour sy refaire.
31 DECEMBRE 1944 : Dans la
matinée par un froid épouvantable et la neige qui tombe, nous quittons ORBEY. Nous
roulons toute la journée. Les équipages sont épuisés. Un tel trajet par un temps
pareil narrange ni le moral des hommes, ni le matériel roulant. Toutes nos liaisons
sont assurées par des jeeps ou des motocyclistes, car les communications par radio sont
interdites. Notre déplacement doivent se faire dans le secret absolu. Nous parvenons au
village de la LA PETITE FOSSE, un peu lugubre, mais intact.
1er JANVIER 1945 :
Notre capitaine nous présente ses voeux. Il souhaite à tous de pouvoir se voir et se
parler le plus longtemps possible
Que va nous apporter cette nouvelle année ?
Nous pensons tous à nos familles angoissées et nous souhaitons que ce cauchemar se
termine bientôt
2 au 20 JANVIER 1945 :
Déjà dix-neuf jours que nous sommes ici au village de LA PETITE FOSSE. On dirait que la
guerre est finie tellement tout est silencieux, on nentend plus le canon tonner au
loin. Nous passons notre temps à réviser notre matériel, repeignant nos chars à la
chaux vive, ou bien nous nous reposons dans les maisons réquisitionnées.
Nous avons participé à une prise darmes à PROVENCHERES où
pour la première fois on nous a présenté létendard de notre régiment qui avait
été caché depuis 1940. Cest à cette occasion que jai été décoré de la
Croix de guerre pour mon comportement à KAYSERSBERG. Quelle émotion quand le colonel
mépingle cette distinction sur la poitrine puis quand il me serre la main en disant
« Cétait dur à KAYSERSBERG nest-ce pas ? ». Mes jambes tremblent
et je suis incapable de lui répondre
Nous recevons lordre de départ à 8h30 le 20 janvier. Nous
quittons LA PETITE FOSSE pour aller à LAPOUTROIE par PROVENCHERES , SAINT DIE et le col
du BONHOMME.
22 JANVIER 1945: Depuis
deux jours nous sommes ici à LAPOUTROIE. Nous blanchissons encore nos chars à la chaux,
enveloppons nos paquetages extérieurs avec des étoffes blanches, tandis que nos chefs de
chars se confectionnent des cagoules. Nous sentons quune puissante offensive va
bientôt se déclencher. Nos unités qui montent en ligne doivent prendre des précautions
exceptionnelles de camouflage. Nous ne devons circuler que de nuit et nous mettre à
couvert le jour, éviter de faire le moins possible de bruit avec nos engins motorisés
afin de ne pas donner lalerte à lennemi. Vu de loin le camouflage de nos
blindés est parfait, ceux-ci se confondent parfaitement avec le paysage hivernal.
23 JANVIER 1945 : Lordre
de faire mouvement arrive le soir. Il neige sans arrêt. On nous annonce que nous allons
attaquer COLMAR. Les Américains commenceront dès cette nuit. Notre escadron se porte à
RIQUEWHIR. Pendant tout le trajet on ne voit presque rien du char qui nous précède tant
les tourbillons de neige étaient denses, soulevés par un vent glacial. Même les traces
de chenilles étaient rapidement comblées. Les véhicules motorisés senfonçaient
jusquaux essieux et linfanterie avait de peine à se frayer un chemin dans
lépaisse couche poudreuse. Chaque homme devait être constamment attentif afin de
coller à celui qui le précédait au risque de se trouver ait soudain isolé.
24 JANVIER 1945 :
Nous faisons mouvement de très bonne heure, le froid est vif et la neige na pas
cessé de tomber. Nous prenons position prés dun bois. Nous avançons, tassant la
neige sous nos chenilles. Ils ont fière allure nos blindés recouverts de blanc. Nous
couchons dans une maison bourgeoise vide de ses occupants. Lennemi est favorisé par
un temps pareil car notre aviation ne peut sortir pour effectuer ses raids.
25 JANVIER 1945 : Notre
groupement a pris OSTHEIM. Après une lutte acharnée six chars ont été détruits. Les
têtes de pont de lILL se sont agrandies mais notre situation évolue très
lentement.
26 JANVIER 1945 : Nous
devons nous porter jusquà la ligne droite de lILL vers le sud. Nous arrivons
rapidement à BEBLENHEIM où nous nous installons pour la nuit. Nous craignons une
contre-attaque de blindés ennemis, car le secteur est tout particulièrement fragile.
Nous sommes à nouveau en première ligne. Nous faisons le plein de carburant et de
munitions : Toutes ces opérations seffectuent sans précipitation, sans lumière et
en silence. Transis, trempés, nous avons les pieds dans leau glacée, la neige le
froid, ce qui vient sajouter aux difficultés que nous impose la résistance féroce
de lennemi. On devine dans léchancrure de la forêt ses premiers
avant-postes
Le paysage est figé, froid comme du métal. Linfanterie alourdie
par le poids des sacs vient prendre position autour de nous et sinfiltre dans la
forêt qui se trouve à notre gauche. Des traînées de brume seffilochent sous le
vent et viennent raser le sol. Des bruits de moteurs nous parviennent au-delà de la
forêt. Est-ce que lennemi va attaquer de ce côté-ci ? On sattend à les
voir déboucher à 500 mètres face à nous !
Nous passons notre première nuit (et quelle nuit
) dans nos chars
toujours en alerte, sans pratiquement bouger
Nous sentons petit à petit nos pieds
devenir raides
attendre ... toujours attendre ... De temps en temps nos yeux se
ferment, pourtant il ne faut pas relâcher notre surveillance ! Et nous ne pouvons
pas nous plaindre car nous voyons que la situation de linfanterie est pire, obligée
par un froid pareil de se plaquer à même le sol dans des trous improvisés
Nous avons pour mission de contenir lennemi dans ce secteur au
profit dautres unités pour assurer leur mouvement dapproche. Pendant ce temps
là notre sous-groupement et linfanterie américaine sont sévèrement
contre-attaqués au nord dHOLTZWHIR. Lennemi bien retranché a en effet reçu
pendant ce temps des renforts, et sa défense est partout efficace.
27 JANVIER 1945 :
Nous passons une nuit calme. Dans cette plaine glacée de MAISON ROUGE, le vent ne cesse
de hurler et la neige tombe sans arrêt. Nous restons vigilants et surveillons en
permanence les lisières du massif forestier ou la lumière parait rassurante comparée à
la pénombre de lintérieur. Celle-ci est en effet propice aux pièges et aux
embûches. La légion qui est linfanterie la plus avancée, est à chaque instant à
la merci de tireurs embusqués derrière chaque buisson ou chaque levée de terre. Nous
avons réussi à faire du café avec de la neige fondue. Ce bois face à nous, nous
obsède, on sattend à chaque instant à voir lennemi en sortir brusquement.
Nous recevons lordre de partir laprès-midi avec trois de nos
chars et de linfanterie Américaine pour reconnaître un pont, le nettoyer et le
faire sauter. Cette progression vaut la peine même si tout est gris et blanc ton sur ton
sous un ciel polaire. Nos chars se font " allumer " à partir du Ladhof. La
riposte est intense. Soudain des flammes jaillissent. Un de nos chars est touché,
tourelle bloquée, canon inutilisable. Laide-pilote affolé essaie de sortir du
char, aussitôt des tirs de mitrailleuse convergent vers lui et il est tué net devant son
Sherman. Le conducteur à son tour pris de panique laisse sa place au tireur qui réussit
à ramener le char vers larrière.
Linfanterie piétine dans la neige, elle progresse par bonds
successifs, se tapit derrière des haies et quelques murets écroulés. Non loin de là un
soldat ennemi est étendu sur le rebord dun trou, inerte, haché par
lartillerie. Les fantassins, grenades à la main avancent prudemment. Soudain à
proximité du pont lair sembrase, une détonation me fait vibrer,
dautres éclairs suivent, le vacarme samplifie : le tir ennemi converge
vers moi
A travers nos périscopes nous apercevons des soldats Allemands qui se
faufilent à travers les haies, aussitôt nos feux se concentrent sur eux. Plusieurs
hommes sont mis hors de combat. Lorsque nous arrivons près du pont, une arme antichar se
révèle, tire et nous manque de peu! La reconnaissance est terminée, la destruction du
pont est effective, linfanterie se retire. Nous rejoignons notre escadron en fin de
journée. Il va falloir monter une patrouille la nuit prochaine avec les Marocains de
lescadron et le chef de peloton pour ramener la dépouille de laide-pilote...
28 JANVIER 1945 :
Encore 24 heures glacées passées dans les parages du pont de MAISON ROUGE. Les
fantassins sont éreintés. Le grand chic de lescadron est dêtre quand même
bien rasé et si possible avant midi. Par 20°C en rase campagne cest déjà
une grande victoire, au moins sur soi-même. Lintendance a de touchantes attentions
: En plus des rations K, voilà quelle nous envoie de la viande fraîche
Pas
besoin de réfrigérateur bien sûr, et la distribution se fait à la scie. Chaque
équipage reçoit un cube de 15 à 20 cm de côté. Avec la hache du lot de bord, on
découpe des tranches grossières et on les fait fondre plutôt que cuire sur un feu à
base dessence bien entendu. Cela devrait être horriblement mauvais, mais sur le
moment cela nous semble presque succulent.
29 JANVIER 1945 : Le
sous-groupement ne bronche toujours pas, et pourtant personne ne parvient à
shabituer au froid. Lartillerie tire sans arrêt et le soir nos chars
exécutent des tirs de batterie à 10 et 12 km. Le canal de COLMAR est atteint et nous
prenons HOLZWIHR et WICKERSWIHR.
30 JANVIER 1945 :
Enfin lordre que nous attendions arrive; nous traversons le canal de COLMAR et
venons bivouaquer à BISCHWIHR qui a été pris dans la journée : le village est
partiellement en ruines et fume encore. Dans les rues, des vaches errent en quête de
nourriture et les chiens recherchent leurs maîtres. Dans les maisons détruites, on voit
encore quelques objets familiers restés à leur place habituelle. Les habitants ont été
évacués par lennemi peu de temps avant notre apparition. De nombreuses mines et et
des abattis jonchent le secteur. Il faut faire très attention de ne pas mettre les pieds
où il ne faut pas ! Dans la nuit, de nouveau nous franchissons à nouveau le canal
de COLMAR et nous nous emparons de WHIR-EN-PLAINE, puis nous poursuivons en direction
dANDOLSHEIM.
31 JANVIER 1945 : Notre opération
prévue pour attaquer ANDOLSHEIM est reportée. Aussi, nous passons une journée à peu
près calme. Le dégel a brusquement commencé dans la nuit.
Fin de la quatrième partie